Voyage à La Gacilly

Cher ami, chère amie,
 
Je vous écris d’une petite ville du Morbihan, j’effectue un voyage à La Gacilly.
De bon matin, je suis arrivé au parking du végétarium, le chant des oiseaux m’accueille.
Les premières photographies à la galerie du Labyrinthe m’interpellent, cette blancheur tranche parmi cette verdure. Cette solitude malgré cette vie qui m’entoure, cet espace… ce cadrage.
Personne, le calme, le doux silence de la nature m’accompagne au gré de ma déambulation, j’apprécie ma découverte, ces détails dans ce blanc, ces regards…
 




Un petit crachin breton tombe doucement à la galerie de la Prairie, je découvre la sécheresse, le manque d’eau, la convoitise d’un bien, d’une parcelle… les bidonvilles, la vie parmi une épaisseur d’immondices.
Puis les peuples du froid, le sol glacé, les scènes de misère à Oulan-Bator, l’insouciance d’une jeune fille jouant à la corde.
Le Bangladesh, la saison des pluies, les inondations pendant de longs mois et cette vie qui continue…
 

La galerie du grand chêne, toujours et encore la sécheresse, la convoitise…
 

Je t’écris à nouveau de la galerie du bout du pont,
je découvre des histoires sans paroles, d’autres silences, d’autres solitudes, seul derrière le masque de clown, seul pour le repos éternel…
 


Du bout du pont, je vois ces champs cultivés, les hirondelles virevoltent dans le décor de la place de la ferronnerie.
 

À la galerie de la passerelle, c’est la profusion architecturale, des édifices, des places grandioses, un nombre incalculable de visiteurs, cette dame seule sur sa serviette de plage, ce monsieur seul qui quitte le terrain de football…
 


Je me glisse dans cette salle, des portraits de producteurs de lait BIO y sont exposés. Heureux, je ne le sais pas mais il transparaît une joie, un bonheur, une certaine sérénité…
Je passe donner le bonjour à la passerelle et monte regarder les tirages noir-blanc dans cette salle blanche.
 
Puis…
je monte par la venelle du Lihoué, venelle fleurie, chemin du bonheur… profusion de fleurs, de mise en scène « cheap ».
Les pavés de la rue St-Vincent, des instants de vie des années 50-60. Mes yeux parcourent aussi le travail des artisans : sculpture, savonnerie, girouettes, peinture…
Au 14bis, Marie est tombée, dure rencontre avec les pavés, le calme est perturbé par des cris stridents, une maman accourt, un souffle, un bisou… plus de peur que de mal.
 

Au passage Lassalle, une inscription propose un interdit, à juste titre, puisque à quelques pas de là, il y a ce qu’il faut, place Yves Rocher.
 

Justement sur cette place est exposé le travail des ateliers photo avec les collégiens du Morbihan encadrés par des photographes : un étrange dîner, nourrir pour se nourrir… à voir et à apprécier.
 


J’emprunte des ruelles ici et là, y découvre des ateliers, des sculptures incorporées aux murs des maisons, une mobylette.
 

Mon voyage est désordonné, j’erre dans les rues en analysant les photographies et écoutant les autres visiteurs anonymes : profusion de nourriture dans cette famille d’Oulan-Bator, du Guatemala, du Bhoutan, de Turquie…
Une petite fille demande : « pourquoi ils prennent en photo du manger ? »
Le papa, embarrassé, bafouille une phrase incompréhensible.
Profusion de nourriture pour certains, pas de viande, pas de poisson, à peine du riz, un œuf par personne et par semaine pour d’autres. Ici, fruits, légumes, là, quatre pains par jour, beaucoup de sodas.
La viande compose la base de la nourriture pour cette famille, autre pays, c’est le maïs pour les tortillas qui accompagne tous les repas à base de fruits et légumes frais ; cinq poulets, 30 œufs par semaine…
Il y a de quoi réfléchir sur le mode de consommation et notre monde de consommation.
 

Me voici à nouveau à la Passerelle, au début des jardins, une inscription au dessus des photographies ; « la grâce naturelle des africains est difficile à imiter dans notre monde « civilisé » blanc ».
La photographe déclare : « j’éprouve des sentiments très profonds pour les extraordinaires ressources en beauté de l’Afrique. Avant qu’elles ne disparaissent complètement, je veux en conserver une partie, ne serait-ce qu’en images ».
L’image est un témoin visuel d’un monde existant.
 









Entre terre et eau sur le chemin des libellules, l’aquaculture intensive, la ferme aux milliers de vaches, de bœufs.
650 ouvriers tuent et emballent 4,5 millions de poulets
« Ils sont énormes, les truies là, les pauvres ! » dit une dame à son mari.
« les bébés cochons, ils vont grandir et passés à l’entreprise après » dit un petit garçon à sa petite sœur.
L’entreprise est la plus grande chaîne d’abattage.
« tout çà à cause de nous » dit une dame.
 

 
Le jardin du Marais m’invite à découvrir d’autres systèmes de recherche de nourriture ; cueillettes naturelles, arcs, flèches, bâtons, juste le minimum… loin, très loin de nos supermarchés.
Saurions-nous capable de trouver notre nourriture quotidienne dans la nature en France en 2015 ? bonne question.

Petit passage à la maison de la photographie avant de suivre l’Aff avec son doux frémissement qui s’écoule jusqu’au collectif image sans frontière, une profusion de couleurs sur le thème « la terre qui nourrit les hommes ».
Il est 14 heures, la foule arrive, d’autres se restaurent, il est temps pour moi de quitter le lieu.
 

Beaucoup de questions circulent sur notre façon de vivre, sur la surconsommation de notre monde « civilisé ».
Certaines parties de notre terre sont accueillantes mais nos ressources de plus en plus limitées. Certains sont très riches et d’autres très pauvres.
Certains se contentent du minimum alors que pour d’autres le maximum n’est jamais atteint.
Certains économisent la moindre goutte d’eau qui va les faire vivre alors que d’autres arrosent les pelouses ou remplissent leurs piscines…
Toujours plus de population, plus de consommation, cela amène à toujours, toujours plus de profit, toujours plus de croissance, toujours plus de questions à se poser et toujours si peu de réponse.
 
Ce travail des photographes, ces visions, ces images, ces photographies, ce Festival Photo… ce fût un plaisir, ce voyage à La Gacilly.
 
Affectueusement.